la charrette attend la fête de la petite Oie
Chaque été, dans nos campagnes normandes, la moisson bat son plein, et les
champs, au matin, se couvrent de travailleurs se hâtant pour profiter du ciel
bleu et du soleil d'août. C'est le grand acte de la vie rurale, c'est pour ainsi
dire le dernier tableau de tout un drame du travail, qui, depuis des siècles, se
joue chaque année.
Elle était bien curieuse, la moisson au moyen-âge, surtout en Normandie, où les baux à ferme s'étant développés dès le IXe siècle, permirent à l'agriculture, en dépit de toutes les guerres, de toutes les exactions, de prendre son essor. Les champs de blé, les blairies, comme on disait, qu'ils appartinssent au seigneur ou aux vilains, étaient entourés de beaucoup de soins et fort bien tenus, quoi qu'on en pense. Après la Saint-Jean, par exemple, commençait le sarclage des blés, fait généralement par les femmes, qui, armées d'une petite fourche, arrachaient les chardons ou, à coups de
faucilles ordinairement fournies par les tenanciers, coupaient les yèbles, une espèce de sureau herbacé qui poussait alors dans les champs. C'est ainsi que le sarclage des blés qui, parfois, commençait à la Pentecôte.
La plupart du temps, les champs de blé, contrairement à l'usage actuel, étaient entourés, surtout quand ils se trouvaient dans le voisinage des forêts - alors très nombreuses - par une véritable enceinte de rameaux qui servaient à les protéger des incursions des animaux. Ainsi en était-il, par exemple, à Grand-Couronne, dans le voisinage de la forêt de Roumare ou de Brotonne, où les champs de blé étaient ainsi défendus par des haies factices de houx, de ronces ou d'épines.. De là, une sorte de droit de ramage que les ramagers ne se faisaient point faute d'exercer, aux mois de mars et de septembre, pour clore leurs moissons.
La moisson, les « aoûteux
»
par Georges Dubosc