Le Gui, ce végétal dont l'existence est si singulière, qui vit et se développe aux dépens de l'arbre auquel il s'est attaché, comme certains insectes s'attachent aux animaux pour leur sucer le sang ; le Gui, qui autrefois était une plante sacrée et à ce titre en grand honneur, est, de nos jours, bien déchu de son ancienne splendeur. Ce n'est plus cette panacée universelle qui préservait ou guérissait de tous les accidens et de tous les maux : c'est tout simplement une plante malfaisante que tout cultivateur, jaloux de la bonne conservation de ses arbres, doit extirper avec soin.
Ce parasite se développe sur presque toute espèce d'arbres ; mais, dans nos départemens, c'est aux pommiers et à quelques variétés du peuplier qu'il s'incruste de préférence, et dont il ne tarde pas à appauvrir la végétation, chez les premiers surtout, si on le laisse croître à son aise.
Le Gui s'implante dans le liber des arbres et vit de la sève qu'ils charrient. On prétend même que quelquefois sa racine traverse la branche et va former une seconde touffe du côté opposé. Il est aisé de comprendre le tort que ce parasite fait aux arbres, puisqu'il absorbe les sucs destinés à les nourrir.
Ce végétal est aux arbres ce que le chardon est à nos champsnon-seulement il nuit au développement de l'arbre auquel il s'est fixé, mais il infecte de ses produits tous les arbres de la contrée. Ses baies sont enduites d'une matière visqueuse, gluante, qui le colle sur le végétal où elles se trouvent transportées par les oiseaux. Car il est d'observation que les oiseaux qui se nourrissent du fruit du gui ne le digèrent pas, en sorte qu'il est quelquefois, à des grandes distances, déposé sur les branches des arbres avec la fiente qui l'enveloppe. La plante doit avoir encore d'autres moyens de se répandre, car on la rencontre sur des arbres et dans des contrées que les oiseaux qui mangent le fruit du gui ne fréquentent jamais.
C'est au mois de mai que le gui commun de nos localités (celui à baies blanches) est en fleur, quelque tardive que soit la végétation de l'arbre sur lequel il vit. Le fruit ne mûrit qu'en automne, et c'est pendant l'hiver qu'il devient la pâture des oiseaux.
extrait de La Normandie agricole, Journal d’agriculture pratique, d’économie rurale et d’horticulture.
Tome III.- 3e année. - 1re livraison. - juillet 1845